En quoi les nouvelles technologies transforment l’univers de la création chorégraphique ?
Mots clefs :
Nouvelles technologies : Sont les outils liés entre autres à l’évolution des matériaux, de l’éclairage ; à la technologie informatique : enregistrement et restitution
d’images (vidéos et films), de son, de nouveaux logiciels de chorégraphie assistée par ordinateur, motion capture, capteurs sensoriels, laser…
Transformer : Changer d’état, modifier une structure, changer la forme, renouveler ; Réécriture ? Métamorphose ? ¨Pastiche ? Rupture ?
Univers : ensemble de tout ce qui existe
Univers de la création : Ici tout ce qui touche à la création scénographie, écriture chorégraphique, corps, arguments, intention du chorégraphe… etc
Création chorégraphique : processus qui aboutit à une nouvelle production matérialisée. Exercice qui part de l’invention personnelle d’un mouvement ou de l’exploitation personnelle
d’un geste ou d’un motif proposé jusqu’à la construction d’une unité d’écriture aboutie.
Questionnements :
De quelles transformations s’agit-il ?
Quelles répercussions l’utilisation des nouvelles technologies a-t-elle sur le processus et le produit artistique ?
Dans quelles mesures, les nouvelles technologies permettent ‘elles de concevoir, d’élaborer, d’inventer de nouvelles formes de spectacles ?
Quelles sont les limites de l’utilisation des nouvelles technologies ?
Jusqu’ou peut on aller sans dénaturer le corps dansant ?
Préserver l’intégrité du corps dansant reste t’il essentiel ?
Problématique possible :
Dans quelles mesures les nouvelles technologies modifient ‘elles la construction d’une œuvre chorégraphique ?
Les nouvelles technologies sont devenues une source particulièrement active dans le champ de l’art chorégraphique et ont transformé peu à peu l‘univers de la création chorégraphique.
Axes de traitement possibles :
- Des outils au service de la création
Sylphide avec la machinerie filins permettant de faire voler la ballerine
Changing steps for caméra 1989 (Cunningham et Caplan)
Dance ( Lucinda Child) 1982
Kaleidoscope 1955 Nikolais
Connaissances complémentaires sur Nikolais:
Dossier pédagogique Opéra de Lille
Chorégraphe majeur du XXème siècle, Alwin Nikolais développa une théorie novatrice du
mouvement, bien que, à l’inverse de Merce Cunningham, son apport fut plutôt esthétique que
technique. Il fut surtout un pédagogue de renom qui a formé tout une génération de danseurs et de chorégraphes.
Théorie :
On peut dégager deux concepts essentiels dans la philosophie de Nikolais : la décentralisation
du corps et l’intelligence du mouvement.
« Nikolais a hérité, à travers Hanya Holm, des concepts spatiaux développés par Laban6
, et on peut d’ailleurs penser que l’utilisation qu’il fait des accessoires n’est pas autre chose qu’une matérialisation des théories du maître allemand. Mais, tandis que Laban organise toute sa
pensée du mouvement autour du centre du corps, Nikolais, homme du XX ème siècle conscient des bouleversements apportés notamment par la relativité d’Einstein, propose de décentraliser le mouvement.
Toute sa technique s’appuie sur la conscience du motion7
et de la dynamique. Il explore le mouvement en admettant que tout point du corps peut devenir un centre de gravité ». Ginot Isabelle, Michel Marcelle, La danse au XX ème siècle. Ainsi pour
Nikolais, « le mouvement est une figure d’action grossière ou globale et le motion est le chemin intérieur qui le qualifie et le transforme en danse. »
Pédagogie :
Nikolais développe une pédagogie qui ne se base pas sur des enchaînements tout faits, mais sur des sensations, des qualités de mouvement et une conscience constante de 4 fondamentaux :
espace, temps, motion et shape (forme). L’improvisation est au cœur de sa pédagogie dont le
but n’est pas d’imiter mais de parvenir à découvrir une danse personnelle, un geste unique.
Ainsi, « fondé sur une conscience affinée de la qualité du mouvement, l’enseignement de
Nikolais ne sépare pas la technique de l’improvisation (qui permet au danseur d’explorer son
propre style gestuel tout en développant sa compréhension des lois du mouvement) de celle de la composition. » Ginot Isabelle, Michel Marcelle, La danse au XX ème siècle
Il enseigna d’ailleurs au CNDC d’Angers qu’il dirigea de 1978 à 1981 où il forma de nombreux chorégraphes français tels que Philippe Découflé.
En résumé :
. « Homme de théâtre total, il utilise la danse non pour sa valeur expressive, mais comme
élément mobile dans un univers irréel. » (Histoire de la danse, Bourcier, 1994)
. Artiste aux multiples facettes (chorégraphe, éclairagiste, costumier, pianiste, peintre,
sculpteur, marionnettiste), il se distingue en utilisant des procédés visant à créer de nombreux effets.
. Son concept de décentralisation du mouvement a apporté une technique de mouvement
originale et spécifique.
« …cet ancien marionnettiste, pianiste, curieux de tout, passionné de cinéma fut un homme de théâtre total, plaçant tout au même niveau : danse, musique costumes, scénographie, …
Toutes ses pièces créées depuis les années 50 rendent compte de cette capacité à créer des formes multiples, quitte à ce que le corps du danseur ne soit plus reconnaissable, avalé ou déformé par des
costumes ou accessoires. Certains critiques parlèrent de "déshumanisation". Lui répondait par "décentralisation et intelligence du mouvement" ou par "motion, not emotion". » Libération (Paris), 24
Février 2004, Marie-Christine Vernay Nik l’enchanteur…
« Nik était un amuseur, un poète, un philosophe. Inventeur de formes et d’espaces, on le disait magicien. D’une suite de mouvements, la motion, il faisait une phrase, une séquence une
pièce chorégraphique, un spectacle total. » Lise Brunel, 1993 Un génie…
« Alwin Nikolais a été le génie créateur de cette esthétique chorégraphique qu’on continue à apprécier et qu’on considère encore aujourd’hui comme nouvelle. Une chorégraphie faite de
formes, de couleurs et de lumières. » Emilio Kalil, 1993 Un maître à danser…
« L’audace de sa fabuleuse aventure artistique, pour situer l’homme dans l’univers (et non pas dans son nombril). La générosité de son enseignement accompagné d’une patience dorée pour
faire émerger des chorégraphes indépendants et uniques (et non pas le reflet de lui-même). Nikolais un grand maître (mon maître) encore aujourd’hui à jamais. » Susan Buirge, 1993
- Des outils pour une recherche créative, une approche expérimentale afin d’enrichir l’écriture chorégraphique en interaction avec le corps dansant : les technologies sont
utilisées en interaction avec le corps du danseur
Variation V 1965 cunningham Cage et Tudor (les mouvements produisent des sons)
Babel heureuse Montalvo Hervieux
Biped 2005
Rosas danst rosas
Le p’tit bal perdu de découflé
Biped, 1999
Pour la première fois, Cunningham montrait le résultat subtil de
son travail avec le logiciel LifeForms. Sur le plateau, des envolées de corps en chair et en os se fondent et se confondent avec leurs images virtuelles projetées sur un écran transparent situé
devant eux. La sensation d'un dédoublement magique de la danse, d'une texture spectaculaire inédite, faisait de cette pièce une bulle de beauté.
Epaulé par les chercheurs Shelley Eshkar et Paul Kaiser, Cunningham orchestrait une fusion féerique entre réalité et artifice. Avant de
convier sur scène ces tourbillons virtuels, les mouvements des danseurs, équipés de capteurs posés sur leurs articulations et leurs extrémités – le fameux système "motion capture" - ont été
enregistrés, retravaillés par ordinateur grâce au logiciel LifeForms pour aboutir à ces formes abstraites. Le "plus" de Biped réside dans la manière dont Cunningham et ses complices
s'emparèrent de cette chorégraphie numérique pour l'exploser en feu d'artifice de traits, points, lignes, dessinant dans l'espace des tableaux abstraits en évolution permanente. Des barres colorées
balayent l'espace croisant des grappes de points reconduisant les silhouettes des danseurs.
Sur la musique de Gavin Bryars, dans des costumes de Suzanne Gallo – des justaucorps seconde peau subtilement miroitants -, Biped,
tout en énergie pétillante, auréolait le geste sobre de Cunningham d'une sorte d'enchantement. Un phénomène dans l'œuvre austère, même si dynamiquement toujours au taquet, du maître
américain.
C'est à partir du début des années 90 que Merce Cunningham après avoir exploré la vidéo se lance à l'assaut des nouvelles technologies. A
quatre-vingts ans passés, il s'offre un défi périlleux et bosse d'arrache-pied. Curieusement, il mesure aussi parfois l'impossible adaptation aux corps humains d'une danse uniquement pensée sur
ordinateur. Certains mouvements se heurtent aux limites anatomiques et doivent être modulés. Déjà mentalement complexe, la danse de Cunningham est devenue de plus en plus difficile à intégrer,
exigeant des interprètes concentrés et véloces.
Rebaptisé "l'Einstein de la danse" parce qu'il reprenait à son compte la formule du physicien "iil n'y a pas de points fixes dans
l'espace", Cunningham n'a jamais démérité de son surnom pendant plus de cinquante ans de carrière. Innovant dans tous les domaines jusqu'au bout de sa vie, il a sans cesse relancé les dés de son
imagination et de sa pratique. Son ultime pièce Nearly 90 a connu deux versions chorégraphiées entre son anniversaire et sa mort, à 90 ans, en juillet 2009. La première, en avril 2009,
brillait de mille feux grâce à l'énorme soucoupe volante conçue par l'architecte italienne Benedetta Tagliabue. Retaillée, la seconde version opérait un retour magistral à ses
fondamentaux : mouvement pur, scène vide uniquement balayée de lumières colorées, danseurs en justaucorps et musique expérimentale. Tout Cunningham !
- Limites de l’utilisation des nouvelles technologies dans la création chorégraphique
Dénaturer le corps dansant
Dénaturer l’essence du spectacle vivant
Dénaturer l’objet de la danse (la danse ne suffirait plus en elle-même)